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Transfert latéral de gènes comme mécanisme radicalement nouveau pour les adaptations écologiques (LATTECO)

Projet de recherche BR/314/PI/LATTECO (Action de recherche BR)

Personnes :

  • Dr.  SCHON Isa - Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique (IRSNB)
    Coordinateur du projet
    Partenaire financé belge
    Durée: 15/12/2014-15/3/2017
  • Dr.  DANCHIN Etienne - Institut National de la Recherche Agronomique (INRA)
    Partenaire financé belge
    Durée: 15/12/2014-15/3/2017

Description :

DESCRIPTION DU PROJET

Context
De nouvelles combinaisons génétiques sont la base de la sélection naturelle. Pour la plupart des organismes supérieurs, cela se passe lors de la recombinaison méiotique (reproduction sexuée). Les bactéries ne possèdent pas de lignée germinale et n’ont donc pas de rapports sexuels. Mais elles peuvent néanmoins s’échanger rapidement et efficacement du matériel génétique par le transfert latéral de gènes (TLG). Longtemps, on a cru le TLG limité aux bactéries mais de nouvelles techniques de séquençage à très haut rendement ont montré qu’il peut aussi se produire chez certains organismes supérieurs (algues, invertébrés et plantes supérieures). Les gènes des bactéries fournissent de nouvelles adaptations à des milieux extrêmes comme la glace (Raymond & Kim 2012) ou la chaleur (Schönknecht et al. 2013). Cependant, dans la plupart des génomes hôtes, la fréquence des gènes étrangers est très basse (de 0.001 à 0.01%).

Dans deux exceptions notables, des gènes étrangers, provenant de bactéries, de champignons et de plantes, occupent plusieurs pourcents du génome hôte. Distribué mondialement, le nématode Meloidogyne incognita parasite toute une gamme de plantes, notamment des variétés agricoles importantes. Son génome contient 3 % de gènes étrangers (Paganini et al. 2012). Il a même été postulé que ce nématode et les espèces parentes n’ont pu développer leur parasitisme que grâce à l’acquisition horizontale de gènes (Danchin et al. 2010). Deux espèces de rotifères bdelloïdes, Adinetaricciae (Boschetti et al. 2012) et A. vaga (Gladyshev et al. 2008; Flot et al. 2013), contiennent chacune jusqu’à 8-9% de gènes étrangers. À noter : ce nématode et ces deux bdelloïdes se reproduisent exclusivement de manière asexuée et ne peuvent donc pas acquérir de nouvelles combinaisons génétiques par une recombinaison sexuée.

Objectifs généraux et questions de recherche sous-jacentes
LATTECO examinera si Darwinula stevensoni a acquis des gènes par TLG et si oui, lesquels. Il estimera la fréquence des TLG chez cet ostracode, la fonction et l’origine de ces gènes étrangers. Cette espèce de micro-crustacé est un modèle parfait grâce à son million d’années d’existence, sa reproduction probablement exclusivement asexuée et sa large tolérance écologique.

Méthodologies
Des bactéries pouvant fonctionner comme donateurs potentiels par TLG, nous appliquerons des techniques métagénomiques sur D. stevensoni. Nous élèverons des ostracodes afin de retracer les éventuels effets écologiques des bactéries sur eux. Nous collectionnerons des données de transcriptomes (ARN) de D. stevensoni, afin d’identifier les gènes candidats pour le TLG par des pipelines bioinformatiques automatisés. Les éventuels gènes étrangers seront localisés dans une bibliothèque génomique existante et séquencés dans leur contexte génomique AND afin d’exclure les contaminations. En outre, des analyses bioinformatiques seront appliquées afin de confirmer les éventuels cas de TLG et de prédire la fonction supposée de ces gènes étrangers.

Impact potentiel de la recherche sur le plan scientifique, sociétal et/ou en appui à la décision
Savoir comment les organismes s’adaptent aux modifications des conditions environnementales est de plus en plus important avec les changements climatiques. Les mutations et la création de nouvelles combinaisons génétiques par la reproduction sexuée sont depuis longtemps considérées comme les seuls mécanismes d’évolution adaptative chez les organismes supérieurs, mais le TLG pourrait s’avérer tout aussi important. Jusqu’à ce jour, de hautes fréquences de TLG ont été observées surtout chez des organismes asexués. Afin de comprendre comment les organismes peuvent s’adapter et se modifier, nous devons estimer la fréquence de TLG chez différents organismes supérieurs provenant d’habitats variés et savoir quels gènes se transmettent préférentiellement. Une recherche de ce genre a des applications importantes pour l’étude de l’évolution et la science en général, car elle remet en question la métaphore de la nature comme un arbre de la vie, avec des domaines strictement délimités pour les eubactéries, archéens, animaux, champignons, plantes supérieures… Le TLG a également un important impact social, surtout pour la médecine, la lutte contre les nuisibles et l’agriculture. La monoculture est souvent de mise en agriculture et en aquaculture, de même que le recours à des lignées clonales présentant peu ou pas de variation génétique et souvent peu de potentiel adaptatif, mais on ignore quelle est la fréquence de TLG de ces organismes. Le groupe de JC Dunning Hotopp a découvert que la fréquence de TLG d’origine bactériale dans des échantillons de cancers humains était plus élevée que dans les échantillons de contrôle (Robinson et al. 2013; Riley et al. 2013). Ce projet aura donc d’importantes implications pour la politique biotechnologique, particulièrement pour la sécurité des bactéries et des organismes supérieurs génétiquement modifiés.

Description des produits finis de la recherche
Les résultats de la recherche seront publiés dans des revues scientifiques et présentés lors de congrès. Le public et les décideurs en seront également informés par des communiqués de presse

Documentation :

LATTECO sur le site web Brain-be

Lateral gene transfer as a radically novel mechanism for ecological adaptations(LATTECO) : final report  Schön, Isa  Brussels :Scientific Policy, 2019 (SP2816)
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